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Sybille Wallemacq

25 October 2018

© Le Dispensaire

Réparer ses vêtements au lieu de les abandonner et acheter autre chose, c'est « mieux » consommer. Inévitablement... Alors que réparer a été associé à la pauvreté ou au manque de moyens dans les dérives d'un système tel que celui de la fast fashion (business modèle basé sur une moindre qualité textile, un faible cout de production et une distribution massive à l'échelle mondiale), on observe des initiatives qui revalorisent cet artisanat.

 
© DR 

Partons d'abord du kintsugi japonais. Signifiant « jointure d'or » en japonais, le kintsugi est une technique de réparation de céramiques et porcelaines qui utilise la laque et la poudre d'or pour mettre en avant la réparation, la sublimer mais surtout, à travers elle, mettre en avant l'histoire matérielle de l'objet, le valoriser pour ce qu'il est et le passé qu'il représente.

Appliqué au domaine textile par un collectif hollandais, le principe de la réparation visible à l'or s'appelle le Golden Joinery. Apporter une touche d'or au vêtement abîmé et à travers elle offrir un futur à une pièce destinée à l'oubli. Dans le même esprit, le #visiblemending a été lancé au Royaume Uni et mise sur l'esthétique de la réparation comme un acte fort. Les techniciens regorgent de créativité et certains résultats mériteraient presque le rang d'oeuvre d'art... Réparer, cela passe aussi par la broderie ou l'application de badges textiles.

 
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Dans le cadre de sa série Mieux consommer la mode, Eventail.be a rencontré Camille Labro-Méler qui ouvrira prochainement Le Dispensaire. « Cadrant pleinement avec l'urgence à interroger nos modes de consommation et à réduire les déchets que nous produisons, Le Dispensaire entend faire valoir que "Repair is the new black!" et se positionne comme un acteur local du mouvement émergent de la slow fashion. » peut-on lire dans le résumé du projet.

Eventail.be – Que pensez-vous du #reparercestresister ?
Camille Labro-Méler - En bref, que du bien! En ce qui me concerne, quand j'ai commencé sérieusement à me pencher sur le sujet de la mode éthique et durable, je me suis sentie prise au piège et bloquée de tous les côtés. Le système est tellement bien verrouillé qu'il parait presque impossible de s'en extraire. J'avais entendu une fois, dans un documentaire, cette phrase disant que "les gens ne se sont pas réveillés un jour en se disant qu'ils avaient besoin de renouveler leur garde-robe tous les six mois mais que cette idée leur a été imposé progressivement et pour servir les intérêts financiers de certains grands groupes".

 
© Le Dispensaire 

Dès lors, pour moi, deux questions sont essentielles: où va notre argent quand on "consomme" de la mode et a-t-on besoin d'autant alors qu'on connait les dégâts écologiques de l'industrie textile ? A ce titre, faire de la réparation mon métier a été pour moi une façon de me positionner par rapport à ces deux questions.

- Est-ce que vous réparez vos propres vêtements ?
- L'expression bien connue disant que les cordonniers sont toujours les plus mal chaussés se vérifie quand même dans la plupart des cas... C'est indubitablement lié au fait que l'on passe nos journées à réparer des choses pour les autres et qu'on a envie d'autre chose une fois rentré à la maison. En dehors de ça, je me suis rendue qu'alors que j'ai une formation initiale de costumière-réalisatrice, j'ai longtemps été moi aussi conditionnée à considérer les vêtements comme des denrées périssables, jetables. Sans être soumise au cycle infernale du renouvellement constant de la mode et des tendances, je constatais que mes vêtements ne duraient en général pas plus d'un an avant d'être troués, décousus, tachés.

© Le Dispensaire 

Par manque de temps, je les mettais de côté (pas le coeur de les jeter) et allais acheter ce dont j'avais besoin. Depuis quelque mois, j'ai décidé de ne plus rien acheter en habillement pendant un an. Du coup, je ressors ces vêtements laissés de côté et je les répare. Certains sont prêts à être reportés après 10 minutes de travail sur ma machine, pour d'autres, les travaux sont plus lourds mais c'est pas grave. Je prends le temps, j'écoute une émission de radio, je m'extraie pour un moment du toujours-plus-vite.

L'ouverture du Dispensaire est prévue pour l'automne.
En attendant, le projet fait l'objet d'une campagne de crowdfunding sur la plateforme bruxelloise Growfunding
www.growfunding.be/ledispensaire
 

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