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Rédaction

20 September 2016

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Fille du prince Michel de Bourbon-Parme, Amélie a étudié l'histoire à la Sorbonne, retrouvant dans les annales nombre de ses ancêtres. Encouragée par son époux Igor Bogdanoff, elle a embrassé l'écriture avec un vif plaisir, livrant un premier livre sur Louis XVII, et un second, plus récemment, intitulé Le Secret de l'Empereur. Pour L'Eventail, elle revient sur la genèse de ce roman historique très documenté et doté d'une intrigue qui lui a demandé dix ans de travail.

L'Eventail - Madame, comment est né cet intérêt pour l'écriture ?

Amélie de Bourbon-Parme - En fait, j'ai commencé à écrire à l'âge de 24 ans. Il y a peut-être un gène propice puisque mon père a publié ses mémoires et ma mère est l'auteur de deux romans. L'écriture m'est donc familière et familiale. Mais l'homme qui partage ma vie, Igor Bogdanoff, m'a aussi beaucoup encouragée. Il trouvait que j'étais souvent drôle et que je racontais plutôt bien les choses. Il pensait donc que je devais écrire. Je me suis donc lancée à la faveur de ma passion pour l'histoire et j'ai d'abord voulu me plonger dans une période qui me fascine vraiment, à savoir la révolution française. Je crois qu'il s'agit d'une époque où le roman rentre alors dans l'histoire, c'est-à-dire que les personnages se mettent à exister de façon plus moderne qu'avant la révolution. Et puis, l'affaire Louis XVII m'a passionnée et j'ai voulu écrire l'histoire de cet enfant. Son coeur avait été emporté par le médecin légiste. Il l'a légué à son fils et la descendance de ce dernier l'a remis à un membre de notre famille qui l'a lui-même donné au Mémorial de France à Saint-Denis. Cette histoire que je trouvais incroyable, presque romanesque rencontrait ma généalogie et cela m'a donné l'envie de l'écrire, d'autant plus qu'on a demandé des échantillons de sang et de cheveu à un frère et une soeur de mon père afin de pouvoir authentifier ce coeur.

 
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- Quelle a été votre formation ?

- J'ai étudié l'histoire à la Sorbonne, puis, j'ai eu l'occasion de travailler avec le philosophe Luc Ferry au Conseil d'Analyse de la Société, une instance qui avait été créée sous Jean-Pierre Rafarin et qui dépendait directement de Matignon. Nous planchions sur des sujets de société comme les cellules souches ou la discrimination positive. C'était passionnant et cela a duré quatre ans. En parallèle, après avoir collaboré avec les éditions Lattès, je me suis occupée d'une collection de livres chez Plon, qui visait à vulgariser les sujets scientifiques pour les programmes scolaires. Je me ensuite tournée vers la communication sans cesser de m'intéresser à l'Histoire : elle est pour moi, pour le moment, indissociable de l'écriture.

- Dans vos deux livres, pourquoi avoir choisi de vous focaliser sur une période assez courte ?

- Je souhaite livrer un roman historique plus intimiste, plus fouillé psychologiquement, et donc, je préfère choisir une tranche de vie bien précise afin de pouvoir cerner au mieux le personnage et son époque. J'ai ainsi plus d'espace pour traiter le sujet en profondeur, pour décrire le quotidien et suivre le héros dans son cheminement, davantage en tant qu'être humain que personnage historique.

- Avec Le Secret de l'empereur, vous proposez un ouvrage très documenté. Comment l'avez-vous préparé ? Avez-vous consulté des historiens ?

- Non, pas du tout. J'ai fait personnellement toutes mes recherches. J'ai lu énormément de biographies, d'ouvrages consacrés à l'histoire de la religion ou, bien entendu, à la Renaissance, un qui n'était pas ma période de spécialisation durant mes études. J'ai travaillé au moins pendant deux ans. Ensuite, il faut un peu oublier pour s'abstraire et écrire quelque chose de personnel tout en s'appropriant l'époque. Ce livre m'a tout de même pris une dizaine d'années !

 
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- Où s'arrête la limite entre l'histoire et le roman ?

- On ne peut tromper les lecteurs avec des erreurs manifestes de dates par exemple. Je veille à ne pas transformer la réalité car j'ai besoin que le cadre demeure rigoureux, documenté, que le contexte, l'ambiance, l'architecture soient plausibles. Et Charles Quint reste un personnage de référence qu'on n'a pas envie de trahir. Après, si l'histoire entourant sa fascination pour les horloges rejoint la vérité, pour le reste, je me suis permis de laisser libre cours à mon imagination de romancière. En fait, il s'agit d'un vrai travail d'archéologue avec des extrapolations mais sans déroger à l'esprit de l'époque. Grâce aux horloges, j'ai pu créer une intrigue. J'ai d'ailleurs beaucoup lu sur le sujet, afin de pouvoir détailler correctement le fonctionnement de ces curieux instruments, à la pointe de la recherche. On se rend compte que la mesure du temps est encore très approximative à l'époque. L'horloge mystérieuse m'a aussi donné la possibilité de mettre un dernier obstacle dans la vie de l'Empereur, un objet qui lui résiste, qui l'anime et le pousse à essayer de comprendre jusqu'à son dernier souffle. Il avait voulu maîtriser l'espace, il lui importait donc de faire une tentative pour maîtriser le temps. Charles Quint se passionnait pour les horloges à cause de son intérêt pour l'astronomie, une façon pour moi d'aborder de façon métaphysique la fin de sa vie. Et puis, se trouve-t-on dans une posture de grande humilité car l'Empereur décide de s'effacer ou, au contraire, devant l'orgueil de quelqu'un qui décide du moment auquel il part ? Une question que l'on peut aussi se poser.

- Avez-vous éprouvé d'aller sur place pour vous imprégner des lieux ?

- Oui bien sûr, je suis allée à Yuste où la maison qui a été construite pour l'empereur existe toujours. L'atmosphère y est très particulière. Le lieu fut choisi par Philippe II mais Charles Quint souhaitait de toute façon se retirer en Espagne car il n'y avait pas encore de foyer protestant. J'ai aussi visité Gand et Bruxelles où, comme vous le savez, le palais a disparu. C'est ville agréable où les gens sont chaleureux. J'y ai d'ailleurs beaucoup d'amis

- Avez-vous un autre livre en chantier ?

- Oui, tout à fait. La trame se déroule en Italie, durant la Renaissance. J'ai envie de romancer davantage, de me donner plus de liberté afin d'échapper aux contraintes d'un cadre.

- Avec le recul, pensez-vous que porter un nom comme le vôtre soit un handicap ou plutôt une chance ?

- Je dirais que c'est un atout dans l'immédiat car c'est un nom qui parle aux gens et donc, qui aide à se faire connaître. Mais cela peut aussi être un handicap car comme tout ce qui peut projeter un symbole, certains seront rebutés et ne souhaiteront pas me lire pour cette raison, en pensant sans doute que je vais conter quelques histoires poussiéreuses. Mon patronyme n'est pas neutre mais j'essaie de ne pas me laisser commander par l'image qu'il pourrait véhiculer. Je souhaite avant tout garder ma liberté. Si le sujet semble, de prime abord, assez difficile, je pense l'avoir rendu moins austère avec la présence des horloges.

Le Secret de l'empereur
Amélie de Bourbon-Parme 
Gallimard
2015
320 pages
20 €

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