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Corinne Le Brun

15 November 2023

Eventail.be – Françoise écrit des romans policiers. Son époux le Commissaire Georges la supplie de faire de lui un héros. Et pourtant…
Corinne Hoex – Georges est très frustré parce que son épouse Françoise l’ignore comme sujet de livre. Il ne travaille pas, elle écrit ses romans à succès. Il en profite. Il a quand même besoin de reconnaissance. Et, évidemment, il n’est pas content parce qu’elle prend pour personnages tout son entourage, sauf lui. Georges ne l’inspire pas. Elle le voit vieillissant, aller courir le guilledou dans le quartier. Il lui ramène des roses de la bonne conscience pour racheter son inconduite. Elle n’est pas dupe. Donc il ne la fait plus rêver du tout.

– Comment vos personnages sont-ils nés ?
Ils sont purement imaginaires. Ce n’est pas très compliqué d’imaginer ces hommes-là parce qu’on est entourés d’exemples de ce genre. On voit tous ces balourds, ces égocentrés, ces mufles imbus d’eux-mêmes. Et, en face d’eux, des femmes décident, à un moment donné, de ne plus se laisser faire. Chacune, selon son tempérament, va réagir et leur damer le pion. Avec patience, avec radicalité, avec cruauté, aussi.

Lily James et Richard Madden dans "Cendrillon" de Kenneth Branagh (2015) © Sunset Box/Allpix/Photo News

– On retrouve Françoise d’une histoire à l’autre
En principe, ce serait même elle qui écrit toutes ces histoires. Françoise crée des liens comme un fil rouge qui va de nouvelle en nouvelle. Les mouches, aussi, volent d’histoire en histoire. Comme si elles donnaient à ces femmes au moment où elles apparaissent, l’impulsion pour leur faire changer de comportement. Très souvent, où la mouche surgit, les héroïnes vont passer à l’acte. Un peu comme Kairos, le petit dieu grec du hasard, du moment propice. Une mouche passe et elle provoque une étincelle.

– Les femmes ont-elles le beau rôle ?
Elles ont, en tout cas, un beaucoup plus beau rôle que celui des hommes. Dans le livre, ils sont tous assez minables. Mais ce ne sont pas toujours des femmes recommandables. Ce sont des tueuses. Elles ont le rôle d’une prise de conscience d’un refus qui ne s’exprime pas toujours d’une manière très douce ni très légitime. Mais quand on est sous oppression, on prend les moyens qu’on peut.

– Seraient-elles féministes?
Elles n’intellectualisent pas mais elles ont un instinct de survie. Elles perdent patience et libèrent quelque chose de l’ordre de la revanche. Elles sortent de leur schéma, elles cessent de subir et elles transgressent. En une seconde, le temps d’un geste imprévu, elles prennent une autre position qui ne ressemblait pas à ce qu’elles étaient jusque-là. Elles s’émancipent avec les moyens du bord. Ce n’est pas prémédité du tout.

– Les princes charmants existent-ils ?
Ils n’ont jamais existé, sauf dans les contes de fées. Ces histoires sont très importantes pour structurer l’être humain : on lui apprend la frustration, la perte. On ne voit jamais un prince charmant tourner au vinaigre, devenir autre chose. Il continue à garder son aura. La femme rêve de l’homme idéal qui va la délivrer, qui va changer sa vie. Le prince charmant crée des illusions et donc des déceptions. Avec un peu plus de maturité, on devrait se rendre compte qu’il n’y a pas d’idéal. Vivre avec la réalité, c’est composer avec le possible.

© Osteria Romna

Gastronomie & Oenologie

Picasso, Autoportrait, 1901

Arts & Culture

France, Paris

Du 30/01/2024 au 19/05/2024

Informations supplémentaires

Livre

Nos princes charmants

Autrice

Corinne Hoex

Éditeur

Les Impressions Nouvelles

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