Ce printemps, les éditions Gallimard ont eu la merveilleuse idée de publier le roman biographique de Catherine Cusset (Ed. Gallimard, 2018) dans une version reliée qui regroupe des reproductions d’une cinquantaine d’œuvres réalisées par David Hockney, entre 1954 et 2023. Dans un style sensible et captivant, l’écrivaine française retrace l’enfance au Royaume-Uni, l’installation en Normandie, les mythiques années californiennes sans oublier la vie intime, les chagrins, les tourments. Et, bien sûr, les innombrables trouvailles formelles que l’artiste britannique a réalisées sur la peinture, la gravure, la sérigraphie, la photographique ou le dessin numérique. « Quand on écrit sur une personne vivante, on peut dire les plus belles choses et fournir un minuscule détail qui, à notre insu, l’offense mortellement. J’avais de quoi avoir peur (…) Impossible d’informer David Hockney de mon projet. S’il disait non, c’était fini. S’il demandait à lire le roman (publié en 2018, ndlr) avant sa publication, je perdais ma liberté au cours de l’écriture. » C’est ainsi que Catherine Cusset raconte “le jour où j’ai rencontré mon héros” dans une postface inédite. Une édition illustrée lumineuse, de toute beauté, où l’écriture passionnée et documentée se love dans des reproductions “hockneyennes” resplendissantes. L’occasion aussi de plonger dans l’exposition de l’été David Hockney 25 à la Fondation Louis Vuitton, à Paris.
Nous voici embarqués dans une vaste fresque familiale. En 1976, à 18 ans, Valentino a quitté sa Calabre natale. Durant quarante années, il a voyagé par le monde. Lorsqu’il apprend le décès d`une lointaine parente, il éprouve le besoin soudain de retrouver ses racines. Du côté paternel, il est le fils d’un avocat anti-fasciste et petit-fils d’un notaire de gauche qui eut de nombreux enfants, dut s’exiler sous Mussolini. Du côté maternel, il est le petit-fils d’un pharmacien juif, violoniste à ses heures perdues. Lui et sa famille vont échapper à la Shoah mais celle-ci pèsera longtemps sur son état mental. Sud foisonne d’une multitude de personnages. On pénètre dans la vie secrète de ces héros “ordinaires”. La petite histoire se mêle à la grande sous la plume d’un conteur hors pair. Il y a un côté cinématographique dans la façon d’écrire de Mario Fortunato. En atteste aussi la précision avec laquelle il décrit le chauffeur sans permis, le facteur qui a peur de ses enfants… On pense au Guépard de Giuseppe Tomasi di Lampedusa magnifiquement porté à l’écran par Luchino Visconti. Diplômé de philosophie à Rome, Mario Fortunato est l’auteur d’une vingtaine d’ouvrages (romans, essais et nouvelles). Sud fait partie de ceux (trop rares) traduits en français. À découvrir sans attendre.
Léa est juive, peu pratiquante. Théo est breton catholique, en quête d’autres réalités. Étudiants, ils se rencontrent sur un stand de tir. Et ne se quittent plus. Ils ont un enfant. Survient l’impensable, l’insupportable, non loin d’un kibboutz en Israël. Si l’attentat du 7 octobre n’est jamais explicitement nommé, la tragédie provoque un séisme au sein du couple. Léa “redevient” juive. Elle se recroqueville sur sa peur et sa judéité. Théo quitte la mère de sa fille, convertie au catholicisme. Nathalie Azoulai n’excelle jamais autant que dans la narration des relations d’admiration, de rivalité, de trahison. On se souvient de son brillant La fille parfaite (Ed. P.O.L., 2022) et du déchirement entre deux sœurs. Théo aspire à un ailleurs, à d’autres identités, refusant désormais la neutralité qu’il avait pratiquée, avec héroïsme, dans son couple. Tombé sous son charme, il va propulser Maya , une artiste libanaise, chrétienne, vers la gloire et la notoriété. Enfin, le bonheur ? Toutes les vies de Théo est une tragicomédie. Nathalie Azoulai prend, elle aussi, une distance salutaire sur un sujet géopolitique encore brûlant, toujours polarisant, dont elle s’empare avec beaucoup audace.
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