Martin Boonen
10 November 2025
Fondée en 1939, Natura était une petite société bruxelloise au chiffre d’affaires modeste de 600 000 euros quand Arthus de Bousies la rachète en 2012.
Fournisseur historique de Colruyt pour leur américain préparé, la marque jouissait déjà d’une clientèle fidèle. “Si ma belle-mère faisait 30 kilomètres de voiture depuis le Brabant wallon pour aller acheter certains produits, dont celui-ci, c’est qu’il y avait un potentiel”, analyse l’entrepreneur, convaincu par ces consommateurs prêts à parcourir Bruxelles pour dénicher cette mayonnaise en pot chez Rob ou à la Grande Épicerie du Fort Jaco.
© Natura
© Natura
Aujourd’hui passée en 100% bio, Natura incarne le “labo durabilité du groupe”. Mayonnaises, vinaigrettes et tartinables biologiques : la marque se positionne sur le premium avec une philosophie engagée. “Au rayon des sauces naturelles, il n’y a pas beaucoup de produits fabriqués en Belgique, avec des ingrédients sans conservateur et sans colorant”, observe Arthus de Bousies.
Le rachat de Bister en 2019 représente, lui, un défi colossal. Cette institution namuroise de la moutarde, deux fois plus importante que Natura, souffre d’années de sous-investissement. “On reprend une boîte avec des ventes qui stagnent et une équipe qui n’est plus habituée à être challengée”, reconnaît l’entrepreneur.
© Bister
Sa stratégie ? Préserver l’ADN de la marque tout en modernisant l’offre. “Il ne faut pas changer ce qui fonctionne. L’image de la marque était plus forte que le produit : le bocal ‘grenade’, son couvercle rouge…”, détaille-t-il. Le pot iconique reste intouché, les recettes aussi. Mais Arthus élargit intelligemment la gamme, ajoutant des couvercles noirs pour la moutarde à l’ancienne, jaunes, pour la Dijon, et verts, pour la bio belge.
Le coup de maître survient lors de la pénurie mondiale de graines de moutarde en 2022. Bister, qui dispose de stocks, voit sa part de marché exploser de 10 à 25%. “On était prêts au bon moment, avec les bons produits et nos concurrents n’avaient plus de moutarde”, résume-t-il.
L’installation dans une nouvelle usine, à Namur, marque un tournant stratégique. Bionat y cultive désormais dix hectares en biologique pour produire des plants de moutarde et de tournesol. “On est pionniers dans la relocalisation de nos matières premières”, souligne Arthus de Bousies. Cette philosophie du circuit court s’étend à l’ensemble de la production : œufs de plein air adoptés avant la concurrence, huile de tournesols belge pour les mayonnaises… “J’aimerais que les consommateurs se rendent compte que l’on peut consommer de la mayonnaise qui est confectionnée comme à la maison”, souligne l’entrepreneur.
L’ambition affichée de devenir un champion européen de son marché témoigne de cette confiance retrouvée. Face aux géants français et allemands, Arthus de Bousies reste optimiste. “Si certains ont pu réussir dans la bière, pourquoi pas dans la moutarde ?” Une ambition légitime pour ce groupe qui prouve qu’excellence belge peut rimer avec succès entrepreneurial.
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