Camille Misson de Saint-Gilles
27 October 2025
Aujourd’hui, L’Éventail fait partie de ces titres que chaque Belge connaît, souvent depuis l’enfance. Qui ne se souvient l’avoir feuilleté chez ses parents ou ses grands-parents… en commençant par les dernières pages pour parcourir les “Mondanités” ? Autrefois, sa tranche noire imposait un style classique. Désormais colorée, elle reflète l’ouverture et la vitalité du magazine. Car si L’Éventail évolue, il le fait sans trahir son esprit : celui d’un compagnon fidèle, à la fois témoin des époques et passeur d’un art de vivre intemporel.
En octobre 1887, trois visionnaires – Max Waller, poète et principal initiateur, Fritz Rotiers, journaliste, et Victor Reding, homme de théâtre – lancent un hebdo dédié à l’actualité théâtrale, mondaine, artistique et littéraire. Il paraît sur quatre pages et est vendu 10 centimes au théâtre de La Monnaie et dans les kiosques bruxellois. Le titre ne se contente pas d’informer : son format pliable permet aussi aux spectateurs de s’éventer avec élégance dans les salles de spectacle mal aérées… d’où son nom poétique et évocateur !
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Le format pliable de L'Éventail permet aux spectateurs de s’éventer avec élégance dans les salles de spectacle mal aérées. © DR
Malgré des débuts hésitants, la persévérance de Max Waller finit par imposer le périodique dans les cercles culturels de la capitale. Sous son impulsion, L’Éventail s’enrichit de nouvelles rubriques : une chronique artistique, des pages sportives consacrées aux disciplines élégantes comme l’escrime ou les courses hippiques, mais aussi des échos mondains relatant la vie des salons bruxellois, véritables foyers d’influence et de sociabilité. Très vite, la revue devient un rendez-vous hebdomadaire de la bonne société cultivée.
À la mort de Fritz Rotiers en 1924, son neveu Fernand Reding reprend le flambeau. Le journal connaît un âge d’or entre 1925 et 1935 : des signatures prestigieuses y contribuent, l’audience s’élargit, et L’Éventail devient un véritable témoin de l’effervescence intellectuelle et artistique de l’entre-deux-guerres.
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Après la mort de Fernand Reding en 1941, son héritage est poursuivi par sa deuxième épouse, Suzanne Mahieu, puis par ses filles, Jeanine et Mariane. Chacune, à sa manière, assure la continuité d’un titre qui doit sans cesse se réinventer pour s’adapter à son temps. En 1969, le prince Jean de Merode reprend le titre, bientôt rejoint par le baron Adelin van Ypersele de Strihou, grand publicitaire qui modernise la publication et la projette vers un lectorat élargi. S’ensuit une série de passages de relais : le baron Serge de Ceuninck et Charles Verpoorten apportent leur expertise et favorisent une fusion temporaire avec le magazine Spécial. À chaque étape, L’Éventail conserve ce subtil équilibre entre tradition et modernité, héritage et innovation.
Les années 1990 marquent une nouvelle ère. En 1992, Stéphane Jourdain, les frères Le Hodey, Albert Frère et le groupe Roularta s’associent pour relancer la revue. L’expérience sera brève, mais elle témoigne de l’indéniable attrait que suscite encore L’Éventail auprès des milieux économiques et médiatiques.
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En 2005, l’entrepreneur français Jacques Berrebi rachète le titre pour l’offrir à son épouse, Dominique Misson de Saint-Gilles. Celle-ci en assure la présidence et la direction de la rédaction pendant plus de vingt ans. Son adage, “Les racines du passé… Les ailes du futur”, résume parfaitement sa ligne éditoriale : respectueuse de l’histoire, mais résolument ouverte sur le monde. Sous son impulsion, L’Éventail connaît un développement remarquable.
En 2024, une nouvelle page s’écrit. François Didisheim, entrepreneur belge spécialisé dans la communication haut de gamme et fondateur de High Level Communication (HLC), devient aux côtés de Christian Dumolin l’actionnaire principal et le CEO de L’Éventail. Il crée le groupe HLCÉ, fruit de la fusion entre HLC (éditeur de titres comme Lobby, Zoute Paper, Gentleman, Play Golf, Play Tennis et The Address Book) et L’Éventail. Sa devise – “Cultiver l’art de vivre” – résume cette volonté de faire rayonner la culture, le patrimoine et le lifestyle belge.
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À ses côtés, forte de huit années passées au sein de la rédaction et aujourd’hui à sa tête, j’ai à cœur d’accompagner cette nouvelle aventure. Elle s’appuie également sur un comité d’honneur, garant de l’excellence et de la crédibilité du titre. Ensemble, nous perpétuons l’héritage prestigieux de L’Éventail tout en l’inscrivant dans les attentes d’un public contemporain, curieux, raffiné et connecté.
Dans cette volonté d’ouverture, L’Éventail franchit aujourd’hui une nouvelle étape avec la néerlandisation de son site internet. Une manière naturelle d’aller à la rencontre de notre lectorat flamand toujours plus large. Dans la même dynamique, nous avons publié notre premier dossier consacré à Knokke en néerlandais, affirmant ainsi notre ambition de faire rayonner l’art de vivre belge des deux côtés de la frontière linguistique.
Aujourd’hui, plus que jamais, L’Éventail continue de briller et de s’épanouir, en Belgique comme au-delà de nos frontières, phyiques et linguistiques. Témoignage vivant de la richesse culturelle et de l’art de vivre, il
demeure fidèle à sa mission originelle : être à la fois le miroir d’une société et l’inspirateur d’un certain art de vivre intemporel.
Mi-magazine, mi-coffee table book, il s’impose autant comme une source d’inspiration que comme un bel objet, que l’on aime garder à portée de main, sur une table basse ou dans sa bibliothèque.
Photo de couverture : © DR
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