Patrick Weber
20 November 2025
Oui, l’on peut encore être surpris après autant de directs assurés entre Londres, Stockholm, Copenhague, Monaco et Bruxelles ! Mais alors, d’où vient mon étonnement ? Il ne provenait pas du faste – somme toute très raisonnable – déployé à la cour luxembourgeoise. Pas plus que de l’enthousiasme populaire, traditionnellement attaché à ce genre d’événement. Non, il était lié à une dimension tout autre : la mise en avant de l’histoire, des liens familiaux dans le contexte d’un monde en crise, avec la guerre à nos portes. Le Grand-Duché a résolument opté pour une cérémonie très “Benelux” et s’il s’agissait avant tout d’un moment national, l’accent a sans cesse été mis sur la dimension internationale de la cérémonie. Le Luxembourg : un petit pays au cœur d’un grand continent et d’un monde en proie aux doutes.
Lors de la prestation de serment, le nouveau grand-duc Guillaume était, bien sûr, placé aux côtés de son épouse, née Stéphanie de Lannoy, et flanqué, à sa gauche, de sa famille proche : ses parents, les désormais ex-souverains Henri et Maria-Teresa, et son fils Charles, un peu turbulent, mais à cinq ans rien de plus normal. À la droite du Grand-Duc, ce ne sont pas ses frères et sœur que l’on retrouvait mais les Souverains belges et néerlandais, ainsi que deux Princesses héritières, Élisabeth et Catharina-Amalia. Il m’est apparu que l’image était très belle et symboliquement forte. Elle rappelle l’importance de ces trois pays – Belgique, Luxembourg et Pays-Bas – dans la construction de l’Europe et la réalité, toujours très concrète, de leur alliance sous la forme d’un Benelux né au lendemain de la Seconde Guerre mondiale.
L’image offre aussi un rappel de la grande histoire, qui fut loin d’être un long fleuve tranquille pour ces trois nations. Celles-ci furent jadis réunies sous les périodes bourguignonne, espagnole, autrichienne et française. En 1815, elles furent rassemblées au sein d’un royaume uni, jusqu’à la Révolution belge de 1830. La Belgique considérait que le Luxembourg faisait partie de son territoire mais, après la guerre livrée contre les Pays-Bas, le royaume fut contraint d’y renoncer en partie. Les Pays-Bas et le Luxembourg connurent une union personnelle sous les règnes des trois premiers Guillaume, puis ils empruntèrent des chemins différents en l’absence d’héritier mâle au sein de la famille d’Orange.
En bref, les trois pays constituant le Benelux se sont maintes fois affrontés, ils ont parfois même combattu, mais sont aujourd’hui réunis sur la photo de famille de l’intronisation d’un souverain voisin et ami. L’Europe aurait de précieuses leçons à tirer de cette association exemplaire. Ainsi que des monarchies constitutionnelles qui composent notre Benelux apaisé.
Photo de couverture : © BestImage, Dana Press
Advertentie
Advertentie