Quelques jours auparavant, dans son discours de Nouvel An, la souveraine s’était confiée en disant « J’ai du mal à comprendre où sont passées ces nombreuses années. C’est allé si vite. Beaucoup de choses ont changé pendant cette période, mais pas l’amour de mon pays ». C’est vrai qu’en 50 ans, la ronde des naissances, des mariages et des décès ne s’est pas arrêtée, que les Danois sont passés de 4 à 6 millions d’habitants, que l’intéressée a fait disparaître de sa titulature “reine des Vandales et des Goths”, bien trop obsolète, et que 163 timbres à son effigie ont été émis !

Au fil des ans, sa popularité n’a cessé de grimper. Alors qu’à son accession, la monarchie récoltait 45% de voix favorable, elle frôle aujourd’hui les sommets, sans avoir pour autant renoncé à ses fastes et à son cher Dannebrog, un yacht qui permet à Margrethe II de passer d’une résidence à l’autre ou de voguer vers les îles Féroé ou le Groenland où ses sujets lui réservent toujours un accueil de choix.

Pour son jubilé, une pièce de 20 couronnes est sortie des ateliers de la monnaie nationale et une médaille en argent doré a été frappée. Sur l’avers, les lions du trésor de Rosenborg veillent sur la Reine, debout, de profil. Chaque membre de sa famille l’a reçue, accrochée à un ruban bleu pâle. Le gouvernement s’est réuni pour lui présenter ses meilleurs souhaits et Margrethe II s’est rendue à la cathédrale de Roskilde pour une messe d’action de grâce mais elle voulait surtout rendre hommage à ses parents qui sont inhumés devant l’édifice religieux. Un moment de recueillement, le sourire aux lèvres, aux côtés de sa sœur la princesse Bénédikte, de ses fils Frederik et Joachim et de ses brus, les deux Marie. Car, de facto, voici cinquante ans que son père, le roi Christian X, a quitté ce monde et elle ne peut oublier. Un dîner familial a ensuite réuni sa famille proche au palais d’Amalienborg.

Aucun neveu mais bien ses huit petits-enfants, les princes Nikolaï, Félix, Christian, Vincent et Henrik, et les princesses Isabella, Joséphine et Athena. Cependant, cet été, les hommages de ses amis du gotha auront bien lieu à Copenhague, foi de viking ! Un jubilé d’or n’est pas chose banale et Daisy mérite assurément le meilleur. Á l’heure actuelle, son règne est le deuxième plus long de l’histoire du pays, après celui du roi Christian IV (1577-1648) avec presque 60 ans à son actif, déjà une sorte de record !

Spontanée, exigeante et artiste jusqu’au bout des ongles, Margrethe II a toujours réussi à étonner ses compatriotes qui, à la moindre occasion, n’hésitent pas à donner de la voix pour les trois « Hourrah » traditionnels. Et si elle a étudié l’archéologie, la Reine peint, dessine, brode et écrit, notamment. Elle s’adonne aussi à l’aquarelle ou ne dédaigne pas mettre en scène des contes d’Andersen quand elle ne crée pas les timbres de Noël. Rien ne semble l’arrêter. Inspirée par Tolkien, n’a-t-elle pas envoyé à l’auteur des illustrations pour son roman “Le Seigneur des Anneaux” ? Et voilà la Reine publiée sous le nom d’Ingahild Grathmer ! Elle croque des costumes de théâtre ou des tenues spectaculaires qu’elle porte avec délectation. Avec son époux Henrik, elle a traduit en danois, “Tous les hommes sont mortels”, de Simone de Beauvoir, en 1981 !

Comme on peut le constater, les Danois célèbrent une souveraine éminemment originale, une femme de tête et un chef d’état investi à l’âme bohême, bref un vrai personnage que cette Margrethe II !