François Didisheim
15 March 2022
Lors de ce funeste jour de mars, son cœur s’est arrêté à trois reprises. Et une fois dans l’ambulance, elle a sombré dans un coma dont elle n’est sortie que quelques semaines plus tard. Si certains y ont laissé la vie, Karen à dû changer de vie. Elle était une athlète accomplie, ex-championne de Belgique junior de natation. Elle avait trouvé sa voie en tant que coach sportive. Mais tout ça s’est envolé en une fraction de secondes, par la volonté d’illuminés.
Si Karen Northshield à commencé à écrire, c’est pour deux raisons principales. D’abord pour ne pas oublier : “C’est une sorte de vade-mecum pour me rappeler tout ce que j’ai traversé, toutes ces épreuves de montagnes russes psychologiques, physiques et émotionnelles”, explique-t-elle. Mais le véritable déclencheur se trouve dans la deuxième raison, qui concerne sa santé mentale. En effet, après avoir soigné son corps, ce qui a longtemps mobilisé toutes ses forces, Karen a été rattrapée par ce qu’elle appelle “La bombe à retardement” ou le syndrome du choc post-traumatique. Il fallait donc commencer à soigner l’esprit. Et c’est pour cela que Karen a pris la plume.
Dire que ce livre n’a pas été facile à écrire est un pléonasme. D’abord, il a fait revivre à l’autrice ce matin d’horreur. Mais encore, parce que Karen a tenu à accorder beaucoup d’importance aux choix des mots employés. Même si, comme elle l’explique : “Quand on est victime d’un attentat, quand on s’est fait exploser par une bombe et toutes les souffrances et la peine derrière, il n’y a tout simplement pas de mot. S’il y en avait un, ce serait sans doute celui-ci : l’enfer”.
Le roi Philippe et la reine Mathilde avec Karen Northshield, lors des cérémonies d'hommage, 5 ans après les attentats du 22 mars 2016 © Yves Herman/Pool/Photonews
Femme de caractère, malgré ce qu’elle a vécu, Karen Northshield ne veut pas qu’on la considère comme une victime : la jambe mutilée, la hanche explosée qui tenait à peine, les intestins à nus, elle a attendu plus d’une heure allongée sur le sol, perdant son sang, sur le point de mourir, s’efforçant de ne pas perdre conscience. Lorsqu’elle est arrivée à l’hôpital Erasme, les médecins n’avaient jamais été confrontés à une personne pareillement polytraumatisée. Elle est restée hospitalisée durant plus de trois ans et a subi une cinquantaine d’opérations. Sa jambe gauche a été sauvée de justesse mais elle est plus courte de dix centimètres que la droite, l’obligeant à porter une fixation compensatoire. Elle a subi des infections bactériennes à répétition qui ont failli la tuer une deuxième fois et l’ont forcée à avaler quantité d’antibiotiques. On lui a enlevé l’estomac et la rate et les séances de revalidation rythment encore son quotidien. Mais notre héroïne s’accroche à cette phrase, qu’elle se répète comme un mantra : “Je ne suis ni une victime, ni une survivante, ni une miraculée…je suis une battante”
Au 20 Kilomètres de Bruxelles, en 2018 Karen Northshield © Bert Van den Broucke/Photo News
Son éditeur, Kennes, considère ce livre comme un message d’espoir : « Quand une vie bascule en quelques secondes, quand nos certitudes sont complètement ébranlées, comment réagir ? Karen nous montre qu’il faut mettre 99% de notre énergie au combat pour sauvegarder ce petit pourcent d’espoir”. Ce livre est un témoignage choc, brut et dur, dont on ne ressort pas indemne. Mais ce évidemment pas que ça ! C’est surtout un message profondément humain et avant tout extrêmement inspirant pour la communauté, car plein d’espoir !
Si vous voulez voir mon intervention sur LN24 où je parle notamment de Karen Northshield, suivez ce lien. Et sinon, vous trouverez tout et plus encore dans le tourne-page du LOBBY 54.
Newsletter Lobby du 11 mars 2022, rédigée par François Didisheim, fondateur de Lobby. Retrouvez Lobby, la revue des cercles du pouvoir, ici
Livre
Dans le souffle de la bombe
Autrice
Karen Northshield
Éditeur
Kennes Editions