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Sylvie Dejardin

18 September 2023

L’Éventail – Quels sont les mécanismes qui expliquent le lien entre la composition du microbiote et le risque de développer une ou plusieurs maladies?
Véronique Liesse – La présence ou l’absence de bactéries dans notre microbiote intestinal peut jouer un rôle crucial dans le développement de maladies. Lorsque des bactéries essentielles sont absentes, certaines fonctions biologiques ne peuvent être remplies, ce qui peut conduire à des problèmes de santé. D’autre part, un déséquilibre dans la composition du microbiote peut favoriser la prolifération de bactéries pro-inflammatoires, potentiellement pathogènes, favorisant l’hyperperméabilité intestinale. L’inflammation est le dénominateur commun de presque toutes les pathologies. La susceptibilité individuelle joue aussi un rôle dans le développement de différentes maladies en fonction de la composition du microbiote. Certaines bactéries possèdent des compétences particulières. Par exemple, les Klebsiella pneumoniae sont capables de produire de l’éthanol, ce qui augmente le risque de développer une stéatose hépatique non alcoolique (aussi connu sous le nom de NASH) sans boire la moindre goutte d’alcool. Cette situation peut évoluer vers une cirrhose ou un cancer du foie. La composition du microbiote peut alors fournir une indication sur l’évolution potentielle de ces maladies et le risque de complications. Autre exemple, la présence de Faecalibac- terium prausnitzii, connue pour son effet anti-inflammatoire, est quasiment absente dans les cas de maladies inflammatoires de l’intestin (MICI). Une personne avec ce profil sera plus à risque de développer un Crohn ou une rectocolite ulcéro-hémorragique. Mais il faut rester humble. On sait que le microbiote joue un rôle central. Mais il y a encore beaucoup à découvrir pour une com- préhension approfondie des mécanismes sous-jacents. Les études progressent vite et nous permettront, dans le futur, non seulement de comprendre tous les tenants et aboutissants, mais aussi d’envisager une prévention et une prise en charge très personnalisée.

© Bettina D

L’Éventail – Comment savoir si notre microbiote est en eubiose (en équilibre) ou au contraire en dysbiose (déséquilibre) ?
Véronique Liesse – Les mille premiers jours depuis la naissance sont essentiels dans le développement du microbiote. Sa qualité dépend de plusieurs facteurs comme le type de nais- sance, l’allaitement, la prise d’antibiotiques, l’alimentation, etc. Passé cette période, il est plus difficile de le modifier de façon durable. Si vous souffrez de symptômes tels que diarrhée, constipation, ballonnements, douleurs abdominales, gaz, migraines, insomnies, allergies, intolérances alimentaires, reflux gastrique ou problèmes dermatologiques, il est fort probable que l’on soit en présence d’une dysbiose intestinale. Ces divers signes doivent amener en premier lieu à consulter un médecin pour exclure toute pathologie. De nombreuses analyses peuvent être réalisées en laboratoire pour affiner le diagnostic, comme une prise de sang, un test urinaire et/ou de selles, un test respiratoire (le plus fréquent est celui du lactose, mais il en existe d’autres). Cependant, tous ces tests ne sont pas encore connus de l’ensemble du monde médical et tous ne sont pas scientifiquement validés.

L’Éventail – Dans votre livre, vous passez en revue vingt pathologies où le lien entre maladie et microbiote est le plus clairement établi. Vous conseillez une alimentation adaptée et les souches bactériennes à privilégier. Quels conseils donneriez-vous pour un microbiote au top ?
Véronique Liesse – Pour être très concrète, j’ai conçu, à l’instar de la pyramide alimentaire, une “pyramibiote” qui reprend les aliments indispensables à consommer pour favoriser l’eubiose. Deux approches sont à privilégier pour contenter ce microcosme. D’une part, les probiotiques que l’on trouve dans les aliments fermentés comme les yaourts, le kéfir, les fromages au lait cru, le kombucha, les légumes lactofermentés, les olives… Et d’autre part, toutes les sources de prébiotiques que sont les fibres (légumes, fruits, oléagineux, psyllium, graines de lin, de chanvre, de chia, légumineuses, etc.), les Oméga-3 présents dans les poissons gras, les huiles de lin, de colza, de chanvre, les polyphénols que l’on trouve principalement dans les fruits et légumes colorés, le cacao, le chocolat noir… Sans oublier les épices et aromates (curcuma, gingembre, ail, oignons, herbes…), tant pour leurs saveurs que pour leurs bienfaits sur le microbiote. L’assiette doit être majoritairement végétale, colorée et la plus variée possible. Un microbiote “de compétition” se travaille au quotidien et nous fournit, en échange du gîte et du couvert, bien des services pour vivre en meilleure santé.

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