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Bruno Colmant

05 September 2023

Le professeur Dr. Bruno Colmant est membre de l’Académie royale de Belgique.

Le professeur Dr. Bruno Colmant est membre de l’Académie royale de Belgique. © DR

On parle de 3,2 milliards d’individus et de six des neuf principaux producteurs de pétrole (les trois autres étant les États-Unis, le Canada et l’Irak). Ces pays envisagent (et, à nouveau, c’est un lointain projet) de réformer le système monétaire sur d’autres bases, à savoir des référents fondés sur le pétrole et l’or. Cette idée de l’étalon-or, tel que nous l’avons connu dans le monde occidental entre 1944 et 1971, a été soulevée, à plusieurs reprises, par des responsables chinois.

L’Europe est exclue des BRICS. Pourquoi ? Parce que la Russie a attaqué l’Ukraine, et que l’Europe a choisi, à juste titre, de s’opposer à cette agression, étant armée par les États-Unis au sein de l’Otan. Tout cela est compréhensible.

Cependant, toute guerre, à travers l’histoire, doit finalement aboutir à une paix. Et la paix commence par un cessez-le-feu. Pourtant, que nous dit la Présidente de la Commission européenne en septembre 2022 ? Elle s’oppose à un cessez-le-feu. Un cessez-le-feu n’est ni une capitulation ni un armistice. C’est une suspension des hostilités. Je le dis en tant qu’officier de réserve honoraire.

Et c’est ainsi que notre continent est emporté, sans consultation populaire ni souffle démocratique, dans une dynamique géopolitique où les États-Unis finiront par nous négliger. D’ailleurs, il ne faut se faire aucune illusion : l’année 2024 sera très dangereuse en termes institutionnels aux États-Unis, et il est fort à parier que l’engagement militaire américain se dissipera en quelques mois dans l’hypothèse d’une victoire républicaine.

On pourra, alors, avec effroi, relire les déclarations matamoresques de certains dirigeants européens qui, prenant la pose en gilets pare-balles pour une nuée de photographes, ont adopté des postures martiales sans jamais avoir consacré le moindre jour à un service militaire.

Brics

En effet, à côté des BRICS se dégage la plausibilité d’une réélection de Donald Trump. Or, l’Europe n’est pas du tout préparée à un retour de Trump comme président américain.

Trump n’a aucune considération pour l’Europe, ni pour l’Otan. Il a affirmé qu’il conclurait en 24 heures un accord pour mettre fin à la guerre en Ukraine et qu’il mettrait donc fin à l’aide américaine à l’Ukraine. À ce moment-là, les va-t-en-guerre actuels devront décider s’ils reprennent le rôle militaire des États-Unis (ce qui est évidemment impossible) ou s’ils abandonnent l’Ukraine dans un embarras total, ce qui est probable. Ceux qui haranguaient dans leurs fauteuils vont devenir munichois.

Trump compte, cette fois-ci, véritablement mettre en œuvre une politique isolationniste au travers de tarifs et taxes à l’importation. Comment allons-nous réagir ? Quels sont les secteurs qui doivent, dès à présent, s’y préparer ?

Trump va probablement faire baisser le dollar. Les méthodes pour y parvenir sont diverses et connues. Cela signifiera que nos importations libellées en dollar seront plus accessibles (au bénéfice des États-Unis), mais que nos exportations seront pénalisées. Notre politique monétaire en tient-elle compte ? C’est bien d’augmenter les taux d’intérêt, comme la BCE le fait, pour contrer l’inflation… si tout le monde le fait ! Or, les États-Unis baisseront leur taux d’intérêt. Et puis, qui sait ? Trump pourrait très bien conduire les États-Unis à un défaut, peut-être partiel, sur la dette extérieure américaine ou refuser la réalité des flux en dollars étrangers. Le jour où cela se produira, ce sera l’Armageddon financier. Y avons-nous pensé ? Et quelle sera la valeur référentielle du dollar si les États-Unis traversent une implosion institutionnelle ?

Trump n’est pas un accident de l’histoire, mais son aboutissement temporaire. La société américaine est ultra divisée, polarisée, armée, exaspérée. Et tout cela ne finira pas bien. Cela pourrait d’ailleurs conduire à des foyers de guerres civiles, voire à des sécessions de certains territoires. Impossible ? Aucunement.

En vérité, nous ne comprenons pas les États-Unis, car nous voulons les voir avec nos yeux. Comme étranger, il faut y avoir vécu, étudié, travaillé pour esquisser la compréhension de ce pays impénétrable, parce qu’il est au bord de la crise de nerfs. Nous ne saisissons pas non plus les nouvelles polarités géopolitiques liées aux BRICS et nous n’avons pas appréhendé l’issue de la guerre en Ukraine. Les prochains trimestres seront donc porteurs de sidérations et de grands gouvernements.

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