François Didisheim
09 December 2025
Chez Steven Delva, la nature n’est jamais un décor : elle est l’architecture même. Né dans une ferme de Flandre occidentale, il a bâti Delva Landscape Architecture & Urbanism autour d’une idée simple et radicale : les sols, l’eau et la biodiversité doivent déterminer la forme bâtie. Son travail, largement salué, s’illustre à travers la création de forêts urbaines, de quartiers façonnés par des plans d’eau et des champs, ou encore l’intégration du futur casino Silt de Middelkerke dans une dune protectrice conçue pour renforcer le littoral contre les tempêtes. À Delft comme à Lisse, il restaure les logiques historiques du territoire pour en révéler les forces profondes. Son approche, où architecture et paysage fusionnent, montre qu’une ville peut se réinventer sans se couper du sol qui la porte.
Avec Bas Smets, c’est l’atmosphère qui devient matière. Le paysagiste bruxellois n’ajoute pas simplement du vert à la ville ; il transforme les microclimats. De Londres à Lyon, ses projets démontrent la puissance de la végétation pour métamorphoser une ambiance urbaine, créer des zones de fraîcheur ou réinventer la relation des habitants à leur environnement.
Les abords de la cathédrale Notre-Dame de Paris conçus par Bas Smet sont telle une « clairière » ombragée par des arbres. © DR
À Paris, il conçoit le futur parc entourant Notre-Dame de Paris comme une clairière rafraîchie par une fine lame d’eau issue des pluies. Son projet Building Biosphères pour la Biennale de Venise 2025 pousse encore plus loin sa vision d’une nature active, capable d’orchestrer lumière, vent et humidité selon les besoins du lieu. Chez lui, le paysage devient un véritable régulateur écologique.
Héritiers de l’œuvre de leur père Jacques, Peter et Martin Wirtz perpétuent une tradition d’excellence qui s’est imposée dans les jardins les plus prestigieux d’Europe. Leur style, fait de perspectives aérées, de géométries douces et de contrastes subtils, a façonné des lieux emblématiques comme les abords de l’Élysée, du Carrousel du Louvre ou de grandes résidences privées de Washington au lac Léman.
À Chicago, un jardin de Peter Wirtz est caractérisé par la sobriété et une volonté d’aller vers l’essentiel. Il a incisé le paysage de jardin avec des traits graphiques et des mini canaux. © DR
Aujourd’hui, ils réinventent le jardin du Musée national archéologique d’Athènes, adaptant leurs palettes végétales aux défis du climat méditerranéen. Leur sens du rythme, de la lumière et de la matière végétale crée des paysages qui évoluent, respirent et se transforment avec les saisons.
Le paysagiste et écrivain Gilles Clément résumait d’une phrase ce que ces trois créateurs belges incarnent avec force : « Le jardin n’est pas un lieu, c’est un processus. » Une vision que partagent Delva, Smets et les frères Wirtz, chacun à sa manière. Leurs œuvres rappellent que le paysage n’est jamais figé : il grandit, se régénère, s’adapte.
En les observant, on comprend que penser l’espace, c’est penser le vivant. C’est imaginer des lieux résilients et beaux, capables de réconcilier l’humain avec la nature et d’offrir à nos villes une respiration nouvelle.
Photo de couverture : L’architecte paysagiste Steven Delva fonde son approche sur la régénération naturelle du site : pour lui, la nature prime toujours sur l’architecture, comme l’illustre l’immeuble du casino Silt, qui sera parfaitement intégré au littoral de Middelkerke. © DR
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