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Après les taxes de Trump, la dévaluation du dollar ?

Bruno ColmantDollarÉconomieFinanceMonnaieSociété

Bruno Colmant

01 May 2025

Pour comprendre la politique monétaire américaine, il faut s’intéresser à son concepteur : Robert Roosa (1918-1993). Ce dernier fait partie de ces hommes oubliés des manuels d’économie. Il n’a signé aucun ouvrage théorique, ni reçu aucun prix Nobel. Il appartient à ceux qui préfèrent le pouvoir dans son efficacité ombragée plutôt que sous le feu des médias.

D’ailleurs, Robert Roosa fut bien plus efficace qu’un homme politique soumis sans répit aux soubresauts des émotions populaires. Il n’avait qu’une seule obsession : assurer la prédominance monétaire du dollar et écarter tous les obstacles qui pourraient altérer l’hégémonie économique américaine. La doctrine Roosa n’est que l’écho des postulats du président Franklin D. Roosevelt qui déclara, à l’aube de sa première investiture, que “la santé économique interne d’une nation est un plus grand facteur de son bien-être que la valeur de sa monnaie en termes d’échanges vis-à-vis d’autres nations”.

Robert Roosa © DR

Né dans le Midwest, Robert Roosa réalise son cursus académique dans son État natal, le Michigan. Il obtient son doctorat en économie en 1942. Pendant des années, il enseigne dans différentes universités américaines, dont le Massachusetts Institute of Technology (MIT) et la prestigieuse Harvard University. Pendant la guerre, il est envoyé à Londres et travaille sous la direction de Charles Kindleberger (1910-2003), artisan du plan Marshall et probablement l’un des meilleurs observateurs des bulles boursières.

En 1946, Robert Roosa rejoint la Réserve fédérale de New York, dont tous les grands noms de la finance américaine seront issus : Paul Volcker (1927-2019), George P. Shultz (1920-2021), Timothy Geithner (°1961), etc. En 1961, sous l’administration de John F. Kennedy (1917-1963, président des États-Unis de 1961 à 1963), il devient sous-secrétaire d’État au Trésor.

Robert Roosa développe alors une doctrine qui continue à faire autorité. Il affirme que si la quantité de dollars en circulation explose, ce n’est pas un problème américain, mais celui des pays qui amoncellent des dollars en accumulant des surplus commerciaux. Cette doctrine fut lapidairement résumée en 1972 par John Bowden Connally (1917-1993), démocrate parmi les républicains, secrétaire d’État au Trésor de l’administration de Richard Nixon (1913-1994, président des États-Unis entre 1969 et 1974) au travers de la mémorable phrase : “The dollar is our currency, but your problem”.

© Creativa Images, shutterstock.com

Aujourd’hui, un homme devient incontournable dans l’entourage de Donald Trump : Stephen Miran, quarante-et-un ans, nouveau président du Council of Economic Advisers de la Maison-Blanche et proche du 79e secrétaire au Trésor Scott Bessent (°1962). Stephen Miran remet en cause l’indépendance de la Federal Reserve, arguant qu’elle est contraire aux exigences démocratiques et au système constitutionnel des États-Unis.

L’idée de Stephen Miran est de transformer les droits de douane américains en outil de négociation. Leur application serait modulée selon la volonté des partenaires commerciaux à souscrire à des obligations américaines à très long terme (un siècle), voire perpétuelles, en échange de la préservation de relations commerciales favorables avec Washington et du maintien de la protection militaire américaine. La valeur de ces obligations tendrait rapidement vers zéro, non seulement en raison de l’inflation, mais aussi de la dépréciation du dollar. Mais Stephen Miran va encore plus loin : il propose que la Maison-Blanche utilise des pouvoirs spéciaux pour réduire les taux d’intérêt des obligations américaines détenues par les banques centrales étrangères qui refuseraient de réévaluer leur monnaie par rapport au dollar.

Stephen Miran © DR

Je crois que Donald Trump va placer la Réserve fédérale sous sa tutelle afin qu’elle refinance la dette américaine à un taux d’intérêt nul, voire négatif. Ce jour-là, le taux d’intérêt réel de la dette américaine deviendra négatif après déduction de l’inflation, entraînant ainsi l’effondrement progressif du dollar, dont la valeur serait rongée par l’inflation, sans possibilité de compensation par des taux d’intérêt plus élevés. Ce serait une première historique, car le dollar reste la monnaie de réserve mondiale. Une telle dynamique provoquerait une perte de valeur progressive du billet vert, entraînant à son tour des dévaluations compétitives des autres devises.

© Shchus, shutterstock.com

En résumé, Donald Trump affirme que la force du dollar donne un avantage injuste aux partenaires commerciaux et les économistes proches du président partagent cette vision. Stephen Miran préconise des moyens non conventionnels afin qu’un affaiblissement significatif du dollar devienne un objectif en soi.

Ce scénario n’est pas inédit : il s’est déjà produit dans les années 1970, déclenchant un chaos monétaire sans précédent, marqué par une inflation galopante et des ajustements économiques douloureux. Tout cela relève, pour l’instant, de la science-fiction monétaire. Mais peut-être pas tant que cela…

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