Inscrivez-vous à notre newsletter

  • HLCÉ

"Only the river flows" : la bonne surprise de l'été

CinémaFilmRéalisateur

Corinne Le Brun

10 July 2024

Wei Shujun explore un polar incarné dans la Chine des années 90. Le jeune réalisateur chinois (33 ans) signe un polar incarné, stylé, très construit. “Only the river flows” était présenté dans la section Un certain regard, à Cannes, l’an dernier. Le film sort enfin en salles. Il est la bonne surprise de l’été. Rencontre avec le cinéaste Wei Shujun sur la Croisette

Chine, années 1990. Trois meurtres sont commis dans la petite ville de Banpo. Ma Zhe, chef de la police criminelle, est chargé d’élucider l’affaire. Un sac à main est abandonné au bord de la rivière, des témoignages désignent plusieurs suspects. L’enquête piétine. Le trouble s’installe. Mis sous pression par sa hiérarchie, l’inspecteur Ma Zhe, s’enfonce dans le doute voire, la paranoïa. Pendant ce temps-là, la rivière coule…

– Vous vous êtes inspiré d’une nouvelle. Qu’avez-vous ajouté dans le scénario ?
Le film est l’adaptation d’une nouvelle éponyme, écrite par l’écrivain d’avant-garde chinois Yu Hua, très connu en Chine. L’œuvre originale offre plusieurs possibilités. J’ai ajouté, par exemple l’inspecteur en chef de la police criminelle. Ce personnage n’existait pas jusqu’aux trois-quarts du livre. Juste une paire d’yeux regardait les trois criminels qui eux existent bel et bien dans la nouvelle. Donc j’ai créé et densifié la vie personnelle de l’inspecteur Ma Zhe. Après avoir lu le roman, l’opéra «Tristan und Isolde» de Richard Wagner m’a inspiré. La musique est lancinante, élégante, énigmatique. Le ressenti dépasse le récit. J’accorde beaucoup d’importance au son dans mes films.

© Norbert Scanella/PanoramiC/Photo News

– Quelles seraient vos références spécifiques au film noir? Jean-Pierre Melville? Bong Joon-ho? (1)
Je n’ai pas du tout pensé que ce serait un film noir. Peut-être que certains le voient ainsi. Je pense que le rêve est le sujet principal du film. Tout est créé dans le songe, ce qui constitue, sans doute, la partie noire de l’histoire J’ai commencé à écrire le scénario, et puis, le rêve de l’inspecteur a progressivement pris plus de place parce que je pensais qu’on pourrait développer le film à partir de là. En fait, mon film parle de la noirceur de l’âme humaine. Je ne cherche pas à m’inscrire dans un genre particulier car ce qui me guide avant tout, c’est ce que je souhaite faire ressentir au spectateur.

– Le film se déroule en Chine, en 1995. Pourquoi avez-vous choisi cette période?
Le milieu des années 90 marque la fin de la période Mao et annonce le début d’une nouvelle ère. J’ai choisi cette période, qui n’est pas précisée dans le livre, parce que, à cette époque, il n’y avait pas de portable, de laboratoires de recherche sophistiqués… Ceci dit, le détail de l’uniforme n’indique pas la transition entre deux périodes politiques. Il incarne plutôt la réalité car, en effet, tous les inspecteurs et policiers sont en uniforme. Mais Ma Zhe, lui, n’en porte pas. Car il faut qu’il se cache. Son blouson en cuir l’aide dans son travail.

– Il veut démissionner….
Il veut démissionner parce qu’il a trop de pression, à cause des crimes commis. Il est fatigué. Il ne s’insurge pas contre le système. En Chine, être inspecteur de police est une certitude de sécurité. Normalement, un fonctionnaire ne démissionne pas car il est bien payé et a un travail stable.

Wei Shujun et Zhu Yilong au Festival de Cannes © Alberto Terenghi/Pool Photo Even/Empics Entertainment/Photo News

– Les policiers veulent s’installer dans une salle de cinéma récemment fermée. Est-ce une façon pour vous de souligner la crise du cinéma chinois?
Dans les années 90, beaucoup de salles de cinéma de la Chine ont vraiment été fermées en raison d’une baisse de fréquentation. Beaucoup d’entreprises s’y sont installées. Il y a eu beaucoup de débats à ce sujet. Après l’an 2000, le marché du cinéma a repris en Chine. C’est une réalité. Ma Zhe n’est pas très content de travailler dans une ancienne salle de cinéma parce que, pour lui, le lieu n’est pas un bureau «normal».

– Vous venez à Cannes pour la quatrième fois (2). Comment se porte le cinéma chinois aujourd’hui ?
Avant le COVID, le marché du cinéma chinois était en bonne santé. Avec la pandémie, il a fortement baissé et, là, maintenant, cela reprend. Pour le Nouvel-An chinois de cette année, on a battu un nouveau record de fréquentation des salles. Au Japon, en Corée du Sud, à Taiwan et Hong Kong, des jeunes réalisateurs émergent. C’est une très bonne chose. Le cinéma chinois se dirige vers une reconnaissance internationale. Dans ce sens-là, être à Cannes est très important.

(1) : Réalisateur de Memories of murder (2003). Le réalisateur sud-coréen a remporté la Palme d’or pour Parasite, en 2019.
(2) : Ripples of Life (Quinzaine des Cinéastes, 2021), Courir au gré du vent (Sélection officielle, label Premier film, 2020), On the border (Mention Spéciale, Court Métrage, Cannes 2018).

VIDEO - Forum de Lobby : Investir sans risque, utopie ou réalité ?

Économie & Finances

Le mardi 10 septembre dernier, le magazine Lobby faisait sa rentrée à Autoworld pour accompagner la sortie de son dernier numéro avec un grand Forum sur le thème : “Investir sans risque : utopie ou réalité ?”. Retour en vidéo sur une soirée riche en apprentissage !

Publicité

"Les fantômes", la vengeance dans la peau

Cinéma

Avec “Les fantômes”, Jonathan Millet nous immerge dans l’intériorité d’Hamid, jeune chasseur de criminels de guerre syriens. Un film d’espionnage franco-german-belge inédit, très documenté et même inspiré de faits réels. Le réalisateur signe ici un polar d’espionnage d’une brûlante actualité géopolitique. Inédit, fascinant et intense il ne ressemble à rien d’autre. Il est aussi un très beau film sur le traumatisme, la soif de justice et la rédemption. “Les fantômes” fut présenté en ouverture de la Semaine de la Critique, au dernier Festival de Cannes. Rencontre avec Jonathan Millet, sur la Croisette.

Tous les articles

Publicité

Tous les articles