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Corinne Le Brun

28 July 2022

L’écrivain Marcus Goldman et le policier Perry Gahalowood font à nouveau équipe pour débusquer le vrai coupable d’une vieille affaire que, dans le New Hampshire, l’on croyait élucidée depuis longtemps. Car ils savent que comme avec les poupées russes, une histoire peut en cacher une autre. Il faut alors recommencer à enquêter, rechercher à quel moment on a fait fausse route. On retrouvera dans L’Affaire Alaska Sanders, suite de La vérité sur l’affaire Harry Quebert (2012) – vendu à cinq millions d’exemplaires-  les thèmes de prédilection de Joël Dicker : la rédemption, la fidélité en amitié et la ténacité. Le romancier suisse déborde encore de bonnes idées! Il publie son dernier thriller au sein de la maison d’édition Rosie &Wolfe qu’il a créée il y a six mois. Un sacré double défi ! Nous avons rencontré Joël Dicker à Bruxelles.

Eventail.be – Pourquoi avez-vous attendu 10 ans avant d’écrire L’Affaire Alaska Sanders ?
Joël Dicker – C’était, pour moi, important de laisser passer du temps après le succès de La vérité sur l’affaire Harry Quebert. Après un tel retentissement, je ne pouvais continuer la trilogie tout de suite car je sentais que cela allait coincer quelque part. Le plus urgent n’était pas de suivre mon plan mais de réagir au succès en faisant autre chose et ne pas rester en circuit fermé. Après plusieurs autres livres (1), je sentais que je pouvais écrire le 2e tome, sans inquiétude.

– Un auteur à succès connaît-il l’inquiétude voire le stress ?
Forcément mais pas comme vous l’imaginez. Je ne suis pas stressé quand j’écris, de même que je ne me pose pas la question de l’argent. Un livre, cela représente trois ans de travail, dix heures par jour. Le vrai moteur, c’est l’envie. Le stress vient quand le livre est fini. Je parlerais plutôt de trac. Je ne peux plus rien faire. Je suis le metteur en scène qui a fait son boulot, qui peut souffler un mot mais si les acteurs jouent mal, il n’y a rien que je puisse faire à ce fiasco. Le trac arrive quand le livre sort.

– Un policier et un écrivain forment-ils le tandem idéal pour mener l’enquête ?
Le policier donne une légitimité aux enquêteurs, et l’écrivain apporte l’engagement humain ou moral dans l’enquête. Ce double aspect donne une couleur à ce tandem. Le policier, dont la recherche de la vérité est le métier; l’écrivain, pour qui il y a quelque chose de plus fort que le devoir professionnel.

Couverture de L'Affaire Alaska Sanders de Joël Dicker

– L’histoire se déroule aux Etats-Unis. Pourquoi pas en Suisse où vous résidez ?
Je connais très bien la côte Est des Etats-Unis. Enfant, j’ai passé tous mes étés dans ce bourg paisible du Maine. C’était une forme de facilité: à savoir être dans un décor très familier que je pouvais décrire de façon immédiate et juste pour me concentrer et utiliser cette base de crédibilité pour une raconter une histoire fictive. L’énigme de la chambre 622 (2020), livre important pour moi, se situe à Genève. Il m’était difficile de créer une Genève de fiction puisqu’elle est mon lieu de vie. J’ai dû me faire un peu violence pour passer ce cap de créer une fiction dans ma réalité.

– Vous vous attachez à décrire les circonstances du meurtre, une façon de décrire la nature humaine ?
Vous soulignez bien que le meurtre, en effet, est un prétexte. Oui c’est un polar, mais ce meurtre dans une petite ville va créer un big bang très fort parce que tout le monde connaît tout le monde. Les conséquences de ce meurtre s’immisceront dans les vies de chacun. Tout le monde est concerné: les destins de l’enquêteur, de la famille, de la victime. Les personnages vivent leur vie sans se poser de question. Ce n’est pas un roman psychologique. Raconter la vie ordinaire des gens permet un transfert entre le lecteur et les personnages.

– Les faits s’étalent sur plusieurs périodes. En 1999, les méthodes d’enquêtes sont menées «à l’ancienne» …
Cela me plaisait car il y a beaucoup de choses qui m’échappent dans la technologie policière aujourd’hui. Et je trouve qu’il y a des moments de littérature dans des petits gestes, par exemple photocopier un agenda, le remettre dans un tiroir comme si de rien n’était… il y a là une scène beaucoup plus vive. Alors que, aujourd’hui, on se brancherait sur le wifi, et on hackerait des informations …, des choses qui me dépassent un peu. J’ai envie de quelque chose de plus romanesque.

– Les femmes, jeunes, sont les principales victimes …
Cela pourrait être des hommes. Si cela choque – pourquoi une femme encore ? – c’est parce que cela correspond à une réalité très malheureuse. Il n’y a qu’à voir le nombre de féminicides incroyable. Il y a Eleonor, Alaska. Hélène, elle, meurt d’une crise cardiaque. On parle beaucoup des AVC. des hommes. En fait, beaucoup de femmes en sont victimes sauf qu’elles ne s’en rendent pas compte parce que les symptômes, les maux de tête, les vertiges sont négligés. Comme les femmes sont beaucoup plus résistantes que les hommes et qu’elles ne se plaignent pas immédiatement, elles passent à côté de symptômes qui sont en fait sont des signes graves. Je me suis renseigné sur ce phénomène méconnu.

Joël Dicker & Patrick Dempsey

Joël Dicker avec Patrick Dempsey © Photo News

– Votre formation d’avocat vous aide dans l’écriture ?
J’ai envie de vous dire immédiatement non. En même temps, je ne peux pas l’affirmer. Je n’ai pas exercé le métier.

– Le crime parfait existe-t-il?
J’ai dû imaginer un crime parfait différemment de ce qu’on imagine en général à savoir le crime dont on ne retrouve pas l’auteur, qui ne laisse aucune trace. Mais quand vous écrivez un roman, si vous ne laissez aucune trace, il n’y a pas d’enquête. Du coup, si le crime parfait était un crime dont on trouverait immédiatement l’auteur?

(1) : Le Livre des Baltimore , Ed. de Fallois (2015) ; Les derniers jours de nos pères, Ed. de Fallois (2015); La disparition de Stephanie Mailer, Ed. de Fallois (2018) ; Le Tigre, Ed. de Fallois (2019).

Photo de couverture : © Anoush Abrar

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