Bertrand Leleu
28 September 2023
Pourtant, les collectionneurs veillent toujours à ne rater aucune occasion de se faire plaisir, que ce soit dans les œuvres d’art ou l’automobile, mais également dans le domaine de la mode, marché qui éveille de plus en plus d’intérêt en dehors de la simple maroquinerie de luxe.
© Sothebys
Nike Air Jordan 1
Caoutchouc, cuir et coton, 1985
Vente du 13 juin, Sotheby’s, New York
À première vue, vous voyez une simple paire de sneakers rouge, blanc et noir… et vous avez bien raison ! Il s’agit, en effet, d’une paire de chaussures de sport de la ligne Nike Air Jordan de 1985, première année de collaboration entre la marque et l’athlète Michael Jordan, adjugée 63 500 dollars. Pour les aficionados, on pourrait croire qu’il est question du modèle Air Jordan 1 Chicago mais, à y regarder de plus près, il semblerait que ce soit un modèle enfant réalisé en taille adulte, spécialement pour le marché coréen, donc extrêmement rare. Dans la bible de ces collectionneurs hors du commun, le livre Nike Chronicle Extra 1984-1986, cette paire est identifiée comme “Air Jordan 1 High Sample Korean License”. Les collectionneurs de sneakers étant de plus en plus nombreux, les prix grimpent de manière vertigineuse ces dernières années, même si, comme pour ce modèle, il n’y a plus de boîte, pas de lacets et un cuir très abimé ! Les grandes maisons de vente ne s’y sont pas trompées et organisent désormais plusieurs ventes spécialisées annuelles.
© HVMC
Sceptre de l’impératrice Charlotte du Mexique
Or, perles, rubis, émeraudes et diamants, réalisé par José Maria Larralde
Vente du 18 juillet, Hôtel des Ventes de Monte-Carlo, Monaco
C’est un morceau d’histoire que l’on présentait à Monaco, en juillet dernier, lors d’une vente de bijoux : le sceptre de l’infortunée Charlotte de Belgique, éphémère impératrice du Mexique. On sait malheureusement que la fille de Léopold Ier poussa son époux Maximilien d’Autriche à accepter le trône du Mexique plutôt que celui de Grèce. Dans cette véritable poudrière dont les insurgés étaient soutenus par les États-Unis, Maximilien fut exécuté seulement trois ans après son accession au trône, alors qu’au même moment, Charlotte était recluse à Tervuren, sous l’œil de son frère Léopold II, en raison de son aliénation. Le couple n’ayant pas d’enfant, le sceptre fut offert au baron Adrien Goffinet en remerciement de ses bons et loyaux services, après avoir réglé la succession entre la Belgique et l’Autriche. Ce sont ses descendants qui se séparaient de l’objet de 34 centimètres de long, renfermant notamment des documents historiques.
© Christie’s
Michael Sweerts (1618-1664)
L’Atelier de l’artiste avec une couturière, huile sur toile
Vente du 6 juillet, Christie’s Londres
Si l’on ne connaît pas précisément la jeunesse et l’apprentissage du peintre bruxellois Michael Sweerts, on sait toutefois qu’il part s’installer à Rome vers 1646 et fut rapidement intégré au fameux groupe des Bamboccianti, peintres du Nord installés à Rome au XVIIe et spécialisés dans les scènes de genre. Rapidement, Sweerts reçoit la protection du prince Pamphili, qui lui assure des commandes dans toute l’aristocratie romaine. Personnage au tempérament irascible, il finit par revenir à Bruxelles, puis effectue un passage par la France et Amsterdam, avant de partir en Asie. En raison de la nature énigmatique de sa production et de la diversité de son style, Sweerts ne fut redécouvert qu’au début du XXe siècle. Les spécialistes s’accordent à comparer ses portraits à ceux de Vermeer. Cette scène d’atelier a été maintes fois copiée et l’apparition de l’original sur le marché explique un coup de marteau au sextuple de son estimation.
© Artcurial
Ferrari 250 LM Berlinetta
Pininfarina, 1964
Vente du 6 juillet, Artcurial, Paris
En 1965, la Ferrari 250 LM remporte les 24 Heures du Mans, déjouant ainsi les pronostics qui annonçaient une victoire de son grand concurrent, Ford. Elle ouvrait alors la voie aux Ferrari de compétition à moteur central. C’était la dernière fois, avant 2023, que Ferrari remportait les 24 Heures ! Autant dire que ce modèle reste un mythe pour les amateurs. Le modèle proposé à Paris était le 10e à sortir des ateliers sur les trente-deux réalisés, ce qui en faisait une rareté. Mais en plus, il est l’un des deux seuls bolides à ne pas avoir couru. Le véhicule possède ainsi tous ses éléments d’origine : châssis tubulaire complet, moteur, boîte, carrosserie, tous inspectés et confirmés par le service Ferrari Classiche. Ce qui peut paradoxalement être un frein pour certains collectionneurs, qui préfèrent des modèles détenant un palmarès. Cependant, celui-ci peut s’enorgueillir d’être passé entre les mains de nombreux propriétaires, dont Massimo Ferragamo (fils du couturier). La voiture, dans un état impeccable, célébrait ainsi en grande pompe ses quasi soixante ans !
© Maison des enchères Ollioules
Gustave Serrurier-Bovy (1858-1910) et René Dulong (1860-1944)
Sellette Saint-Saëns, modèle créé en 1905, acajou, verre, laiton
Vente du 8 juillet, Maison des enchères, Ollioules (France)
C’est une ligne très architecturale que présente cette élégante sellette, digne des plus beaux gratte-ciels des années 1920. Pourtant, nous ne sommes qu’en 1905, lorsque Gustave Serrurier-Bovy et René Dulong dessinent ce mobilier. Réalisé en acajou blond, le meuble fait partie d’une collection baptisée Saint-Saëns, en hommage au compositeur. Si le designer souhaitait, a contrario du mouvement Art nouveau, développer des lignes de mobilier éditées en série et de manière industrielle, il créait parfois des modèles plus onéreux pour des commandes ou des présentations à des expositions. C’est le cas ici, avec ces incrustations de verre de la maison Loetz et ces ornements en laiton doré. Cet ensemble Saint-Saëns fut ainsi présenté à l’Exposition universelle et internationale de Bruxelles en 1910, lors de laquelle il sera fort apprécié. Issu d’une collection française, ce petit meuble illustre l’actuel engouement pour le mobilier de la célèbre maison liégeoise.