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Shakespeare au Théâtre Royal du Parc

ShakespeareThéâtreThéâtre royal du Parc

JC Darman

25 January 2023

Dédiée aux sentiments amoureux, La Nuit des Rois n’est peut-être pas la plus scintillante, mais surement la plus ambiguë des comédies de William Shakespeare.

Après Roméo et Juliette la saison passée, le Parc poursuit son exploitation des œuvres du “Grand Will”. Il n’en a certainement pas emprunté le chemin le plus aisé en montant La Nuit des Rois. Ne fut-ce qu’en raison des difficultés de traduction et d’adaptation en français des comédies de l’époque élisabéthaine. Elles sont truffées de jeux de mots de l’anglais parlé à Londres au tout début du XVIIe siècle (la pièce fut créée en 1602) et exploitent le comique de situations propres à l’époque et totalement ignorées ou oubliées aujourd’hui. En outre, la poésie érudite du texte et en l’occurrence la trame alambiquée de cette comédie peut la rendre quelque peu malaisée à aborder de nos jours. Qu’on en juge : le bateau transportant Viola et son frère jumeau Sébastien fait naufrage. Les deux jeunes gens échouent à deux endroits différents des côtes de l’Illyrie, chacun croyant qu’il a perdu son jumeau. Olivia (Margaux Frichet) se déguise en homme et, sous le nom de Césario, se met au service du duc Orsino (Nicolas Ossowski) qui règne sur le pays. Le duc l’envoie plaider sa cause auprès de la comtesse Olivia (Anouchka Vingtier) dont il est éperdument épris, mais celle-ci refuse ses avances. En revanche, la comtesse s’éprend de d’Olivia-Césario tandis que celle-ci est tombée secrètement amoureuse du duc. De son côté, Sébastien (Maxime Laal Riahi) entretient une amitié ambiguë avec Antonio (Valentin Vanstechelman aux allures de Johny Depp), une sorte de capitaine-pirate qui l’a sauvé des eaux. Il faudra la longue dernière scène pour assister à la réapparition de Sébastien. Les jumeaux se retrouveront, les choses s’expliqueront et rentreront dans l’ordre et la morale sera sauve.

Nicolas Ossowski (le duc Orsino) et Margaux Frichet (Olivia) © Allan Beurms

Maxime Laal Riah (Sébastien), Valentin Vantechelman (Antonio), Enea Davia (Sir Andrew), Soufian El Boubsi (Sir Toby) @ Allan Beurms

Entretemps, pour amuser le public (n’oublions pas qu’il s’agit d’une comédie et même d’une farce), s’imbriquent les avatars des proches d’Olivia : deux compères alcooliques, Sir Andrew (Enea Davia) et son ami Sir Toby (cousin de la comtesse – brillamment interprété dans un style Comedia dell’Arte par Soufian El Boubsi -), une commère rusée, Maria (sa suivante – Cindy Besson avec beaucoup de truculence -) et un fou philosophe, Feste (son bouffon, personnage par essence transgressif interprété par un virevoltant Benjamin Van Belleghem). Évidemment on retrouve aussi le dindon de la farce : Malvolio (très habile interprétation de Didier Colfs), l’intendant d’Olivia, personnage puritain pétri de stupidité hautaine qui tombera dans un traquenard tendu par les comparses (ils lui ont fait croire que la comtesse voulait l’épouser).

Nicolas Ossowski (le duc d'Orsino) et Margaux Frichet (Olivia) © Allan Beurms

Les nombreux écueils et pièges dont cette pièce est hérissée, la metteuse en scène Daphné D’Heur les a très brillamment surmontés. Elle est parvenue à rendre la comédie aisément accessible tout en lui conservant le cachet du théâtre baroque. Elle a même accentué le côté farce de la pièce en y apportant, par exemple, quelques allusions anachroniques ou encore en faisant parfois jouer certains comédiens en aparté, de profil, visages tournés vers le public comme dans les pièces de Feydeau. L’ensemble de la troupe fait preuve d’une belle homogénéité. Les costumes sont chatoyants et la scénographie se met adroitement au service des chassés-croisés de la pièce.

Valentin Vantechelman (Feste), Soufian El Boubsi (Sir Toby) et Cindy Besson (Maria) © Allan Beurms

Didier Colfs (Malvolio) © Allan Beurms

Shakespeare avait-il instillé un dessein plus ou moins caché dans cette comédie ? Quelques exégèses récentes y ont entendu une résonnance très contemporaine : celle de la théorie du genre et de l’identité sexuelle. Il est vrai que ce presque anagramme Olivia/Viola, la gémellité de Viola et Sébastien, les actions en miroir des personnages, les attirances qu’ils suscitent et subissent constituent autant d’éléments qui peuvent effectivement attester combien les passions amoureuses peuvent ignorer le genre et l’identité. On ajoute encore aux entremêlements ambigus en sachant que lorsque la pièce fut créée, les femmes ne pouvant paraître en scène, les rôles féminins étaient tenus par de jeunes garçons travestis. Ce bousculement des normes sociales entrait-il vraiment dans les intentions de l’immense auteur anglais quand il a composé cette Nuit des Rois ? La réponse, si elle existe, peut être suggérée par le metteur en scène mais appartient en définitive au spectateur.

À voir au Théâtre Royal du Parc à Bruxelles jusqu’au 18.02.2023.

Photo de couverture : Soufian El Boubsi (Sir Toby), Cindy Besson (Maria), Enea Davia (Sir Andrew) © Allan Beurms

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Informations supplémentaires

Pièce

La Nuit des Rois, de William Shakespear, mis en scène par Daphné D’Heur

Adresse

Théâtre Royal du Parc
Rue de la Loi 3
1000 Bruxelles

Dates

Jusqu’au 18 février 2023

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