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Christine Jordis, comprendre l'énigmatique Japon

2 / 3 épisodes

AuteurCatherine JordisInterviewL'été de la spiritualitéLivre

Corinne Le Brun

26 July 2023

La spiritualité s’invite à travers quatre itinéraires éclectiques qui tournent (presque) toujours au récit épique. Que l’on savoure avec délectation ! Deuxième épisode, avec Christine Jordis et « Le nuage fou ». L’écrivaine raconte la vie mouvementée d’un moine zen japonais du XVe siècle

Depuis Bali, Java, en rêvant (Ed. Gallimard, 2005), Gandhi (Ed. Gallimard, 2006), Paysage d’hiver. Voyage en compagnie d’un sage (Ed. Albin Michel, 2016) (1) et plus récemment Impressions japonaises : un pas vers le moins (Ed. Desclée de Brouwer, 2019), Christine Jordis poursuit sa découverte de l’Asie. Elle emboîte le pas dans la vie excentrique de “Nuage fou”, surnom d’Ikkuy, poète japonais, moine zen et bon vivant du moyen-âge. Une biographie romancée. Un voyage dans la spiritualité nippone.

Eventail.be – Le nuage fou fait suite à Impressions japonaises: un pas vers le moins …
Catherine Jordis – Les deux livres se tiennent, en effet. Dans Impressions japonaises, je pars à la recherche du moine Kukai (Kobo Daishi, 774-835) fondateur de l’école du bouddhisme Shingon au Japon. Né dans une famille prospère et ami de l’empereur, il était un esprit complet à la Leonard de Vinci. Je me mets à le suivre dans les endroits où il a vécu. Pendant mon voyage, j’entends parler de Ikkyu Sojun, un moine du 15e siècle, bien différent. Sa vie est un roman. Personnage excentrique, fils illégitime de l’empereur, poète, bon vivant, “Nuage fou”, c’est son surnom, est proche du peuple. Pétri de spiritualité, il aime les femmes. Il tombera amoureux sur le tard d’une jeune chanteuse aveugle. Ikkyu Sojun est un personnage très populaire au Japon. L’immense écrivain japonais Yasunari Kawabata (1899-1972) lui avait déjà rendu hommage, dans son discours du prix Nobel de littérature, en 1968. Récemment, Ikkyu, représenté comme un gamin joueur, insolent, est même devenu un héros de mangas. Pour les Japonais, il est un compagnon dans la vie de tous les jours.

© Photo News/S.Alfredo Venturi

– Le jardin du Ryoan-ji est un lieu emblématique. Pourquoi ?
Situé au nord-Ouest de Kyoto, il est le jardin zen le plus célèbre du monde. Pas très grand, il se présente sous la forme d’un rectangle de sable blanc, immaculé, d’un dépouillement extraordinaire. Quinze pierres y sont dressées pour l’éternité. Le jardin donne l’impression d’un naturel alors que tout est savamment travaillé. Il est interdit de s’y promener. Vous vous asseyez sur la véranda et vous regardez les pierres. Cela vous donne une telle impression de présence et de paix que cela m’a marquée. J’avais entendu dire qu’étaient gravés sur une des pierres les noms de Kotaro et Hukijiro, deux intouchables du 15e siècle. Comment ces deux parias se sont-ils retrouvés là ? Je me suis interrogée sur le lien qui pourrait exister entre ces deux gueux et Ikkyu qui ont réussi à s’élever dans la société. Et, peut-être, étaient-ils les vrais créateurs de ce jardin du Ryoan-ji.

– La littérature anglaise comme la culture asiatique vous passionnent. Quels liens voyez-vous entre les deux ?
Très jeune, quand je suis arrivée en Angleterre, je me suis sentie chez moi. Je reconnais en moi une appartenance anglaise, surtout à travers la littérature. Bien plus tard dans ma vie, quand je me suis retrouvée à Djakarta pour y retrouver mon frère, je me suis sentie comme si ce pays était depuis toujours en moi. J’ai retrouvé en Asie cette même extrême civilité, cette façon de filtrer les réactions, comme les Anglais. Je n’ai pas trouvé de brutalité dans les relations humaines. Tout est feutré. Ce n’est pas de l’hypocrisie. Il s’agit de dissimuler des sentiments qui n’ont pas lieu d’être montrés, tout simplement. Cela touche à des profondeurs extraordinaires. Le sens du mystère ne m’est pas étranger. Il me plaît.

(1) : Essai sur la vie de Kim Jeong-hui, poète et peintre sud-coréen, pour lequel Christine Jordis a reçu le prix Ecritures & Spiritualités (2017)

3 épisodes

L'été de la spiritualité

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Pino Pascali Delfino, 1966 GAMeC – Galleria d’Arte Moderna e Contemporanea di Bergamo. Dono Tito G. Spini, 2018

Pino Pascali

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En dépit de sa mort prématurée, Pino Pascali (1935-1968) a largement contribué à l’art de l’après-guerre. Cet été, plus de cinquante œuvres de l’artiste italien sont exposées au musée de la Fondazione Prada.

Italie, Milan

Du 28/03/2024 au 23/09/2024

Informations supplémentaires

Livre

Le Nuage fou

Auteur

CatherineJordis

Editeur

Édiitions de l’Observatoire

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Livres

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