Virginie Draelants
23 October 2025
L’Éventail – Comment est née l’idée de planter du thé en Belgique ?
Mathieu Jacobs – Je viens d’un tout autre univers, je suis juriste. J’ai longtemps travaillé avec des détenus, et j’ai toujours eu cette conviction que l’on devait trouver d’autres voies de réinsertion. En parallèle, j’ai lancé plusieurs projets, dont Give Day, un réseau de volontariat. Mais je suis aussi un grand amateur de thé. Au fil de voyages au Sri Lanka, en Inde ou encore aux Açores, j’ai découvert les plantations et je me suis dit “pourquoi pas ici ?” Avec le changement climatique et l’évolution des cultivars, j’ai appris que le Camellia sinensis – le plant de théier – pouvait pousser sous des latitudes très variées, parfois même dans des stations de ski au Japon ! J’ai donc commencé à creuser l’idée et découvert que ce rêve n’était pas si fou.
Mathieu Jacobs © Maison Jacobs
© Maison Jacobs
– Concrètement, comment se déroule le projet ?
– Nous allons planter ce mois-ci 2000 théiers sur une parcelle de 40 ares à Mont-Saint-Guibert, dans le cadre du projet agricole collaboratif Sur le Champ. L’objectif est de prouver qu’il est possible de produire un thé de qualité en Belgique, comme le fait avec le vin depuis quelques décennies. Dès l’an prochain, nous espérons récolter une petite quantité – une dizaine de kilos – grâce à des plants déjà âgés de trois à quatre ans. Petit à petit, la production augmentera. Nous allons travailler sur différents types de transformation : thé noir, thé blanc et sans doute aussi du thé vert.
– Qui vous accompagne dans cette aventure ?
– Je ne suis pas agronome, donc je me suis entouré d’une équipe passionnée et compétente. Florian, un jeune agronome, s’occupe du terrain et du “jardin des saveurs” qui accompagnera la plantation avec des fleurs et des herbes aromatiques. Sophie est sommelière du thé, Valérie gère la partie technique, Olivier développe la marque et la communication, et Marc – également avocat – s’occupe du volet social lié à la réinsertion. Car au-delà de l’aspect agricole, ce projet se veut aussi une porte d’entrée pour des personnes en réinsertion qui participeront à l’entretien, à la récolte et à la transformation.
© Maison Jacobs
© Maison Jacobs
– Vous avez aussi prévu une dimension pédagogique…
– Oui. Nous travaillons avec l’UCLouvain et l’ULB pour faire du site un lieu de recherche sur le thé : terroir, techniques de séchage, qualité… Et nous souhaitons ouvrir la plantation aux visiteurs. Peu de gens savent vraiment comment se cultive et se transforme le thé. L’idée est de partager cette expérience, d’organiser des ateliers, des visites, mais aussi des événements festifs comme la première “fête du thé” prévue lors de la plantation inaugurale, dans quelques jours.
– À quoi rêvez-vous pour la suite ?
– Notre ambition est claire : produire un thé premium 100 % belge. Nous voulons prouver que cette plante, cousine du camélia qui orne nos jardins, peut donner naissance à une filière locale, durable et innovante. Et si, en plus, elle devient un vecteur de réinsertion et de convivialité, alors nous aurons vraiment gagné notre pari.
Photo de couverture : © Maison Jacobs
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