Bertrand Leleu
12 November 2025
© Ivoire
Chine, XVIIIe siècle
Petite jarre type “guan”, porcelaine
Vente du 14 septembre, Ivoire, Reims
Si l’on osait le raccourci, on pourrait résumer le prix de cette porcelaine chinoise à sa valeur linéaire de 100 000 euros par centimètre, tout rond ! De quoi donner le vertige depuis ses 10,5 centimètres de haut… Datée (très prudemment) du XVIIIe siècle, cette petite jarre décorative s’inspire d’objets d’époque du règne de Chenghua (dynastie Ming, 1465‑1487). Son décor reprend, en effet, certains codes de l’iconographie bouddhiste traditionnelle : encadrés de fleurs de lotus, des dragons à tête de Makara semblent flotter sur le monde. Figurant la force et la noblesse, ceux-ci sont supposés symboliser le pouvoir de l’empereur sur le monde et au-delà, comme l’indique la marque “ciel” en dessous. Une chose est sûre, la finesse du décor et la délicatesse des couleurs auront suffi à faire s’envoler les dragons au plus haut des cieux.
© Herbette
Il est des artistes que l’on pense connaître par cœur tant leurs œuvres ont été éditées à de très nombreux exemplaires. Pourtant, à travers cet important bronze figurant une scène de chasse on redécouvre ici Pierre-Jules Mêne (parfois orthographié Mène – NDLR). Si la représentation animale est l’une des préférées du sculpteur, cette scène reste parmi les plus recherchées des collectionneurs et fut, dès son exposition au salon parisien de 1861, l’objet d’un immense succès. Est-ce dû à la force et à l’expressivité de ce groupe cynégétique ou à l’attrait de l’exotique chasseur en kilt écossais ? La demande fut telle que le groupe dut être divisé et édité en trois scènes : l’Écossais montrant un renard à un chien, la grande jument de chasse avec petit chien griffon et le chien griffon-terrier couché. Cet exemplaire, fondu du vivant de l’artiste, reste en tout cas pour son nouvel acquéreur une belle prise !
© Artcurial
Époque Empire
Poissonnière de campagne, cuivre et fer
Vente du 23 septembre, Artcurial, Paris
Si l’objet provient de la majestueuse Malouinière du Bos, près de Saint-Malo, c’est surtout l’un de ses propriétaires précédents qui explique la fièvre qui a investi la salle de vente parisienne. En effet, cette poissonnière en cuivre provient des cuisines personnelles de Napoléon Bonaparte durant la bataille de Waterloo, comme l’indique le chiffre “N” sous couronne impériale poinçonné sur le côté. Récupéré après la débâcle française de 1815, le récipient aurait permis à l’Empereur de déguster, durant les rares accalmies, des poissons cuits au court-bouillon, à l’image des rougets qu’il affectionnait, lors de son séjour sur l’île d’Elbe, ou encore de la bouillabaisse à la sétoise que Napoléon appréciait également. Preuve que même les symboles d’une défaite restent sacrés pour certains collectionneurs.
© Haynault
Sous la domination coloniale espagnole, la ville de Pasto (sud de l’actuelle Colombie) s’est imposée comme un centre artisanal remarquable au sein de la Nouvelle-Grenade. Les arts décoratifs de cette région, et plus particulièrement la technique du barniz de Pasto (vernis de Pasto), constituent l’un des meilleurs exemples de l’alliance entre les artisanats sud-américains et le registre décoratif espagnol des XVIe et £XVIIe siècles. La technique de ce fameux vernis est unique, utilisant les bourgeons et la résine de mopa-mopa (un arbuste originaire des forêts andines) et elle est d’ailleurs classée patrimoine culturel immatériel de l’Unesco. Muni d’une serrure et d’écoinçons en argent, ce petit coffret est un rescapé de l’histoire des arts décoratifs, car on ne connaît que quelques exemplaires, conservés dans des musées américains.
© Christie's
La cote de Sophie Taueber-Arp n’en finit plus de grimper ! L’artiste d’avant-garde suisse séduit toujours autant avec ses compositions colorées et géométriques. Membre actif du mouvement Dada, elle est l’une des rares femmes artistes ayant exercé une telle influence sur les mouvements artistiques du début XXe. Formée aux arts appliqués, elle a d’abord travaillé dans la broderie et le design textile, avant d’élargir sa pratique à la peinture abstraite, la sculpture et la décoration, annihilant la frontière entre art et artisanat. Difficilement classable, l’œuvre de Taueber-Arp s’étendait également à des performances, très audacieuses pour l’époque, où la jeune femme dansait masquée et costumée, sur des sons irréfléchis et des poèmes phonétiques.
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